Le mouvement est l’expression de la vie, voilà un postulat que personne ne peut remettre en cause mais encore faut-il pouvoir illustrer ce propos et le mettre en perspective. L’auteur : Eric Delion ostéopathe diplômé d’ethnologie et surfeur, va nous guider à travers son livre pour nous permettre de penser l’être en mouvement.
Une entreprise audacieuse qui commence par un rappel des origines de l’ostéopathie et des grands principes énoncés par A. Still, qui n’a eu de cesse de rechercher les expressions du mouvement et sa présence dans le corps humain.
« Le découvreur » de l’ostéopathie comme il aimait à se définir, a élevé cette pratique vers une démarche philosophique se référant aux lois universelles qui régissent l’ensemble des êtres vivants; et pas seulement à un ensemble de techniques ni à une méthode de soin. Sutherland a ensuite enrichi la découverte de de Still en conceptualisant la notion d’immobilité dynamique à travers le modèle crânien.
L’auteur souligne que les différentes étapes de son cheminement intellectuel sont exemplaires car elles sont le chemin que suit l’ostéopathie depuis toujours: la structure – la sphère crânienne – le concept du mouvement respiratoire primaire – la palpation qui devient perception – notion d’écoute fluidique- et enfin les voies énergétiques, spirituelles qui font l’être humain.
Sentir ce rythme commun à chaque individu demande des mains aussi légères que possible surement une des clefs essentielles du traitement ostéopathique.
L’auteur oppose le monisme qui place l’individu comme étant l’émanation d’un tout unique composé de l’univers, du cosmos et du monde, et le dualisme cartésien qui sépare le monde physique et le monde psychique et spirituel.
Les changements profonds s’opèrent d’abord au niveau de l’individu et se propagent par la suite à l’ensemble du corps social, cela doit nous rappeler un des principes de l’ostéopathie : la correction d’une simple unité vertébrale peut rééquilibrer l’ensemble du corps .
Dans cette démarche l’auteur évoque les philosophies orientales entre autres le bouddhisme, sa pratique à travers la méditation, pour vivre mieux avec soi et son environnement, véritable plaidoyer d’une « économie » plus écologique soucieuse de l’harmonie de l’homme avec lui-même et le monde.
En énonçant certains principes simples qui consistent à relativiser le bien et le mal, il rapproche l’expérience de Sutherland de la pratique méditative faite de silence intérieur pour atteindre la connaissance.
L’ouvrage nous invite à rechercher la vérité qui est forcément en nous et non pas dans la comparaison avec l’autre. Par extension la recherche de la lésion, de l’immobilité ne se fait pas sans l’union de la main et de l’esprit.
Monsieur Delion file la métaphore pour notre plus grand plaisir et une meilleure compréhension d’un livre érudit et dense .
S’adapter en permanence aux conditions différentes et changeantes n’est il pas le destin humain ? C’est aussi ce que doit faire le surfeur être en mouvement avec le mouvement qui le déstabilise. Il expérimente sur la vague la notion d’éternel présent notion chère à la philosophie bouddhiste faisant fit du passé et du devenir; l’auteur compare de fait la méditation et l’effort physique du surfeur en notant la présence commune de neurotransmetteurs qui procurent une sensation de bien être . Ces effets apaisants expliquent la dépendance à ces pratiques intenses dans la concentration et qui stimulent la production de sérotonine « hormone du bonheur » .
Les vagues sont la résultante de phénomènes complexes qui lient entre eux l’eau et la terre, nous oblige à penser un monde interdépendant proche de la philosophie ostéopathique. L’auteur nous accompagne dans cette réflexion en se référant aux mythologies polynésiennes pour penser le mouvement comme l’addition de rencontres qui interagissent . Le surfeur, l’homme vertical trait d’union entre le ciel et la terre.
La mer est considérée comme une source de vie , l’auteur nous rappelle la proximité entre notre milieu liquidien interne et la composition de l’océan . Le surf comme guide de vie et la vague sur lequel le surfeur évolue avant le déferlement sorte de phase «inspiratoire» et ensuite toute sa puissance comme un souffle la phase «expiratoire»; la vague métaphore de l’existence , illustré par l’aphorisme: rien n’est permanent sauf le changement. Pourquoi est ce plus pertinent par rapport à tout autres choses de comparer la pratique ostéopathique et le surf ? Eric Delion y répond en notant les analogies qui existent entre l’environnement (océan,vagues,marées) et les tissus du corps humain traversés par des mouvements rythmiques que souvent seul l’ostéopathe peut sentir.
Le still-point ou point équilibre souvent recherché dans le traitement et fréquemment ressenti par le surfeur quand tout est harmonie autour de lui.
Le surfeur est son comportement amène l’auteur à poser la question le surf est il une pratique zen? La notion d’ immobilité dynamique qui peut être aussi une appréciation du mouvement respiratoire primaire l’amène à le penser .
La matière et l’anti-matière ou la double nature de la matière physique et psychique l’une se voit et se palpe l’autre pas mais pour autant elle existe . Eric Delion à la manière de Deleuze nous enseigne les principes de la physique quantique avec efficacité et tout le long de la lecture; l’ostéopathe que je suis ne cesse de faire des analogies avec notre pratique et les principes qui la soutiennent .Que cela soit dans les évocations des origines du surf , des philosophies extrême orientales ou de la mécanique quantique.
Et l’on découvre ou on redécouvre que l’univers est un tout dont on fait parti et que chaque parti de nous est à la fois l’univers et complètement unique . Tropisme d’ostéopathe oblige nous pensons à notre pratique , nos mains qui travaillent sur une parti du corps renseignent de l’équilibre global de l’individu .
Autre thème développé dans cette ouvrage la gémellité et la notion de « double » qui se vérifie de l’infiniment grand à l’infiniment petit dont le concept de matière et anti matière en est l’illustration la plus originale . Belle formule que l’univers quantité constante et expressions différentes illustre parfaitement le fait que l’ énergie ne se crée pas ne se détruit pas mais se transforme . Conséquence inattendu la fameuse expression : »la structure gouverne la fonction « est mise à mal car les deux mots ne peuvent être dissociés étant donné qu’ils ne font qu’un.
L’ anatomie s’est déjà du mouvement , le cerveau s’est déjà de la pensée. Que la mémoire se niche partout et notamment dans les fascias qui enregistrent les dysfonctions comme une toile d’araignée tendu , illustrant le concept de tenségrité cher aux ostéopathes car il constitue un des fils conducteurs de leurs pratiques.
L’auteur à cette occasion nous donne une précision pertinente de la finalité du traitement ostéopathique: rétablir un lien entre l’information originelle et les structures en dysfonctionnement. Réconcilier l’être avec ses origines qui l’on façonné rétablir une connexion qui existe dans le champ quantique. Celui-ci est constitué d’ondes électromagnétiques qui caractérisent la matière de la plus petite à la plus grande y compris la pensée.L’auteur parle de signaux subtils émis par ce champ que notamment l’archéo-cortex perçoit à travers l’intuition .
L’étude de la croissance de l’embryon nous renseigne sur la place prépondérante des axes vasculaires qui préfigurent la vie et nous renvoie à la fameuse loi de l’artère émise par A Still.
Pour finir E Delion nous fait comprendre que c’est l’être en mouvement qui a imposé l’ostéopathie comme la réponse la plus adaptée aux corrections nécessaires de ces lésions. A Still l’exprimait à sa façon « je n’ai pas inventé l’ostéopathie mais je l’ai découverte ».
L’ostéopathie est zen, bouddhiste , quantique, universelle et efficace.
Belle démonstration monsieur Delion.